AGES

 

 Catastrophes, menaces et risques naturels

Natur und Umwelt: Risiken, Gefahren und Katastrophen

 

Congrès de l'AGES  -  10-12 juin 2021  -  MSH Clermont-Ferrand

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Le moteur diesel : victime collatérale d'un certain catastrophisme climatique ?
Gilles Leroux  1  
1 : (Université de Strasbourg)
(Université de Strasbourg), université de Strasbourg, Université de Strasbourg

Nous nous proposons de revenir sur les conséquences en Allemagne du « scandale Volkswagen », éclaté à l'automne 2015, pour l'industrie automobile d'une part et pour les automobilistes d'autre part. Après un bref rappel des faits relatifs au scandale stricto sensu (en particulier les manipulations techniques auxquelles se sont livrés les constructeurs automobiles), nous analyserons les réponses des autorités publiques allemandes et dresserons le constat d'une certaine frilosité à tirer toutes les conséquences de la fraude. Nous nous demanderons si ces atermoiements représentaient une illustration de la collusion souvent dénoncée entre milieux politiques et industriels et conviendrons que l'incapacité du gouvernement fédéral à réagir rapidement et à parler d'une seule voix ne pouvait aboutir à autre chose qu'une pénalisation des automobilistes allemands. Ces derniers firent en effet les frais d'une série d'interdictions de circulation prises à l'encontre de certains types de véhicules diesel dans plusieurs villes allemandes quelques mois plus tard. Nous nous interrogerons sur le bien-fondé à la fois moral et juridique (expropriations d'automobilistes), mais aussi écologique (climato-écologique) de ces mesures édictées dans un contexte général de lutte contre le réchauffement climatique.

Loin de toute volonté de nier l'évidence du réchauffement climatique, il s'agira plutôt de questionner la pertinence d'une telle radicalité vis-à-vis du moteur diesel compte tenu de la priorité accordée à la lutte contre le réchauffement climatique. L'impression qui domine est en effet celle d'une confusion entre enjeu sanitaire et bénéfice climatique, dans un contexte alarmiste et catastrophiste sans aucun doute justifié, mais pas nécessairement bon conseiller, et qui n'est d'ailleurs pas sans rappeler celui ayant prévalu en 2011 concernant le nucléaire. Les attaques en règle contre les véhicules diesel eurent en effet comme première conséquence de faire s'envoler les ventes de véhicules à essence dont les émissions de CO₂ sont supérieures. On peut par conséquent évoquer ici un véritable effet pervers du bannissement des moteurs diesel, de la même manière que la fermeture des centrales nucléaires avait conduit à la réouverture de centrales à charbon. Nous verrons en outre que des doutes furent émis quant au risque sanitaire réel émanant des véhicules diesel. La question n'est donc évidemment pas de prétendre que le diesel (ou le nucléaire) ne présente aucun risque, mais de se demander si les choix le concernant furent les mieux avisés face à l'urgence climatique. La radicalité de l'hostilité soudaine au moteur diesel n'aurait certes probablement pas été si forte sans le scandale Volkswagen, mais ce furent surtout les hésitations du gouvernement à contraindre l'industrie automobile à assumer pleinement ses erreurs qui permirent à la Deutsche Umwelthilfe, l'organisation écologique allemande à l'origine des plaintes systématiques contre un grand nombre de villes allemandes où les critères de qualité de l'air n'étaient pas respectés et où les interdictions furent finalement prononcées, de se faire entendre de la justice. Nous tenterons de mettre en lumière le rôle de cette organisation non-gouvernementale et, à travers elle, un éventuel excès de juridisme de la société civile, possiblement favorisé par le contexte catastrophiste. En effet, à quelques rares exceptions près, les interdictions de circulation furent presque toujours décidées alors que les responsables politiques au niveau fédéral comme régional s'étaient prononcés contre et avaient souhaité les éviter.


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